pierre = situation
++
essai = effet
(r)êve (s)olution
1
Si l’existence ordinaire reste, quoi qu’on fasse, selon les différents paramètres scientifiques, une forme quelconque de violence capable d’affecter la volonté, toutes les sortes de connaissance et de maîtrise qui structurent les relations et les échanges au travers de la vie sociale distordent la réflexion des êtres pour aboutir en pratique à leur auto inquisition.
2
Seul le réflexe de garder un œil sur la propagande sociale permet d’en percevoir les contrôles, autant que les champs de la conduite dans lesquels ils s’accomplissent. Par exemple, les acquis sociaux n’éliminent pas le travail : s’interroger sur leur pérennité ou leur garantie engage la réflexion par l’usage d’une fausse interrogation dans le champ même voulu par les contrôles.
3
Bien des rêves innocents, sans le savoir, masquent les complètes connaissance et maîtrise sociales des êtres qui, ne le sachant, produisent inévitablement au travers de leurs actes aussi bien que dans leurs limbes oniriques les effets de la structuration mentale issue de cette surveillance.
4
Essayer de savoir c’est d’abord tenter, par cette sorte d’intrusion de l’échange arbitraire, une enquête, une représentation en général particulière, aux fins d’expliciter le décalage entre l’objet et le sujet.
5
Qui engage le jeu institue la règle unilatérale, cela sans discussion préalable des objectifs et des usages. Le capital comme jeu culturel, dont la règle du marché s’énonce de manière linguistique et symbolique, dote l’échange usité d’une aura de relation primordiale, chaque joueur par la suite n’en percevant qu’un semblant d’objectivité.
6
Lorsque apparemment rien ne peut neutraliser ou suspendre la surveillance sociale, prendre la distance ne devient possible qu’en restant invisible et à rendre invisibles les échanges quotidiens (entendu qu’il faille décharger l’existence de son apparence ordinaire).
7
Le contrôle social étant capable de mettre à la place de l’être une pensée dont la légitimité sociale serait le point crucial devient autant capable de lui manifester un point de vue propre que de l’en rendre aveugle. Ainsi, la marginalité vise une séparation qui tend en réalité à assurer au contrôle social sa légitimité et à éradiquer en pensée les velléités d’éloignement que tout être, vis-à-vis de la société, déciderait volontairement. Quoiqu’il soit bel et bien possible de se passer du système social – de se dissocier des malfaiteurs –, l’éloignement volontaire est montré généralement comme une excentricité, une folie, un suicide. Ô ! pour le dernier cas, qui donc acceptera d’y voir un assassinat déguisé ?
8
Tandis qu’une pensée sociale introjectée prend place en l’être, elle occupe son espace cognitif, l’absorbant par des interrogations dont l’être – tout au désir de s’épanouir – n’aurait que faire mais, l’obligeant à prendre parti sur des choses qui ne concernent qu’autrui, ces interrogations le séparent nécessairement à la compréhension de soi.
En outre la pratique sociale, se fondant sur la théorie des origines couplée à la maîtrise génopsychique, pose l’être en tant que produit mécanique issu de la société laquelle serait l’unique condition possible à son existence. De là, puisque l’être fait partie de l’ensemble social, alors ce conditionnement psychique exerce un effet particulier sur l’être : il ne se positionne et ne se projette qu’à l’intérieur de l’espace social. Ne pouvant le comprendre il ne peut donc expliquer l’internement psychique dont il subit les effets ; encore moins les pensées qui, si elles l’agitent, cependant ne sont pas les siennes.
9
Cette situation réduit les états d’âmes en une manière de conduire le sens vers des réponses qui appellent représentation puis, conditionnées, qui deviennent produit et, enfin, objet à la hauteur du savoir : une vie dépourvue de tout. Une pierre.
23 mai 2006