La douceur d’une heure matinale. Usée de mots mécaniques au-delà des ongles. Sans bruit de colère. La nécessité d’autrefois n’est plus, mais les phrases au rythme des appareils parlent aujourd’hui de ce monde, moitié vivant et moitié machine. Déclics de métal. Saccades de pauses en éclats des femmes crapauds renouvelables. Vous voici comme les autres, lourdes à l’obéissance. Mais vous ne saviez pas l’irrésistible. Vous n’aviez pas compris que l’instruction est faite pour vous apprendre à obéir. Toujours la machine est soumise à un maître. Toujours la machine est le maître de quelqu’un. Homme-machine. Femme-machine. Comment se réparer ?
Dans l’aquarium le sourire du silence. Satisfaction agréable à sentir. Plaisir permis de l’existence. L’heure qui passe ne sert qu’une fois. Rapport avec l’autre par la puissance des yeux. Sentir son thorax se détachant de la bouche et, entre les doigts, combien d’argent ? Il n’y a pas de riche qui vaille. Se garder des propos et des conférences. Rire très vite du vent trop sérieux. Savoir seulement que la vue est bonne. Hurler plutôt que chanter un petit air vexé.
Crac ! Une balle retombe sur le tapis. Serait-ce trop vous demander en quoi vous trouvez du plaisir à payer ? A penser ? Le téléphone sonne. Allo ? Vous n’avez rien vu ? Pourtant ces notes, dans ce tiroir. Au milieu du milieu des autres, l’odeur nue des peaux et l’épilepsie de leurs marchandises.
S’épier de loin. Assez ! Assez ! La terre est ronde. Au-delà de la fenêtre, la terre froide s’entend de loin, au travers des vitres. On a raccourci la forme des chevaux pour en faire des voitures. Au pays des pickpockets le marchand est roi. Becs. Boutiques. Bouches. Mâchoires des rues automobiles. Allo ? Ramasser au plafond les pensées de tout à l’heure. Les mettre en boule puis, les jeter dans la corbeille. Le téléphone sonne de nouveau. Dire être heureux. Aimer l’inconséquence commune. Travailler. Ce spectacle épouvantable. Aller voir la machine à écrire qui n’est plus la même femme. Soudain, la peine, pourquoi ? C’est le faux-jour ! Sourire gauchement devant le téléphone. Supporter de laisser s’en aller un regard libre. Suis-je aussi un humain ? Pourtant le téléphone n’écoute pas. Jamais parler. Jamais penser. Chacun se ment à soi-même. Ne parlant pas au téléphone, les hommes taisent leurs mensonges. Ils veulent juste savoir. Certes, juste deviner toujours. Qu’ils ne peuvent rien. N’oser rien dire sinon la bonne heure. Celles des machines heureuses.
Froisser le journal de la semaine. Froisser les plis du cœur fou. Étouffer les millions des banquiers. La fuite des créances trouve froids les amis. Les pingouins d’affaires ont ri de leurs mensonges, sentant la marche du monde à leur image. Dans les glaces, s’endormir et près du lit essayer son corps. Être formé de raison. Être qui n’en sait pas davantage. Faut-il craindre ce que l’on veut ? Même un petit peu ? Paraître. Montrer. Le dédain chaque soir de n’être jamais compris. La nuit, chez soi, se refuser certains plaisirs. Travailler le jour pour chaque soir, dans les bars, boire et danser. Regarder cette récompense, la chercher dans les poches. Comme le luxe des habits de maître d’hôtel. Conversations de lavabos qui boivent le champagne. Aimer tout dans un cendrier. Être libre de presque rien, des moments de nausées. Boule légère d’un visage de papier. Partie fine de vestons et de robes. Barman ivre pendu aux étiquettes, tendant bien droite sa cravate. L’eau de Vichy détourne les têtes d’un air discret.
On dépose les quincailliers sur les divans. L’étoffe des plantes, trop timide, est une chose invisible qu’on doit quitter. Où vas-tu maintenant ? Oh ! Comme d’habitude. Plus tard, la commande immobile d’un bras de glace tremble un peu. Ne pas songer à employer la violence. Demander. Réfléchir. Se refuser ou toujours donner ? Dire non ? Ne pas s’y laisser prendre. Respirer très fort, à toute vitesse. Les mâchoires qui se lèvent tôt y trouvent leur plaisir. Pourquoi ? Il aura toujours raison, l’amour de ce corps qui, au dernier moment se dérobe. Dire l’indifférence qui n’accuse pas. Pour l’amour du ciel ! Suis-je maître de mes mots lorsque je me tais ? Qu’on en parle plus ! Pencher son visage pour y lire les pensées. Ne pas penser. Pardonner la colère des autres car ils sont loin du cœur. Cela va passer. Le ciel est déjà dans la rue, debout.
Un bravo remet en route de la main, on n’aurait su dire pourquoi. Bientôt l’engourdissement d’une autre dentelle. Du domaine du corps. Détester ou accepter. Chercher ailleurs du droit de disposer de la machine. N’être même pas capable d’une autre réponse que le désir. A l’inverse, mépriser la joie d’un ancien démon au lieu même de ses idées. Sans doute la tresse des amants est un secret dont seules les maîtresses avouent le prix du monde. Les toujours s’arrêtent.
S’endormant, “ les choses ” recherchent l’amour dans le vin. Lassitude ou souvenir des yeux fermés. Il est bon de donner son oreiller aux poussins. Manger du chocolat chinois ? Ce n’est pas très sérieux, tout ça !
Des rubans de mur et de publicités criardes annoncent des cours jusqu’à de si grandes hauteurs ! Mettre en marche. Apprendre le direct. Apprendre des autres leur matière réelle. Ce qu’ils préparent sur les chemins de rencontre. Et comment se forment les gestes qui les font grandir. Attendre la circulaire correspondance du matin, bourrée de rendez-vous. Sous les bras, les coups de plume que l’on reconnaît à leurs périodes d’agitation. Bon ! Tout d’un coup, dans la boîte, les mots fournissent malgré tout leur inquiétude. En haut, à gauche. S’avouer à la dernière heure. Se rendre à la maison du travail. Des esclaves. Des registres. Jusqu’au groom que chacun espère comme un leurre. S’introduit l’opinion de tout savoir. Difficile ! Difficile de commander des événements sans lustre. Être partagé entre tous. Entrevues de pardessus. Tout semble faux même les cols. L’écran barré d’une buée trouble. Aveugles d’être là. Éclats de voix nécessaires du monde. Difficile d’être moins sordide. En espèces sonores, la peur se fixe dans les poches. Geste de la pince qui joue avec un crayon. Disant ses discours avec beaucoup de mots grossiers.
Ces paroles-là réalisées ce matin reprendront demain ce que les pelleteuses ont construit. Les Sciences demandent des armes devant le Paradis. Avancer. Ne jamais perdre. Prendre tout son bien. Enfin, ne perdre plus. Être droit. Assuré de son ambition. La sagesse d’avoir un travail et ainsi grandir peu à peu. Se faire à la puissance. Désirer faire de son mieux. De toute sa force et croire sans doute. Qui sait, mourir auparavant. Ou bien réussir de tout attendre. Redouter l’enthousiasme et la sévérité des besognes ingrates. L’ennui. Renoncer enfin à penser. Tout ce qui les concerne, connaître les villes. La richesse qui plaît aux toilettes. Place à la défiance.
Appliqué à imiter la mort. La mort ment. Elle laisse cependant la vie s’ajouter aux lendemains. Demain. Quitter la maison avec des gestes de voix. Un cri poussé devant. De quelle mort vient le pouvoir ? Et maintenant, de pousser trop vite, supporter d’être en groupe. Rares sont ceux qui réussissent à en être content. Douter des costumes de hardiesse. Souvent poursuivre les gants d’un hurluberlu. Mépriser la joie et lui donner le nom de folie. Disque dur pâle. Encore entendre ces mots et renouer le journal et relire ce qui n’est pas ailleurs. Informé des buts. Donner la liste des troubles. La réitération des instances. Ailleurs. Comment aimer ? Suis-je fou ? Pourtant les trains ont vraiment peur. Entrer en fureur comme l’averse par une porte ouverte. Non ! Plus rien. Plus de colère et plus de diable. Se méfier des symptômes, qui sait ! Arracher un “ Va te coucher ! ”. Fou de venir voir. Déchirer le journal qu’on eut dit un chien déchiqueté. Prêter à l’âge la raison des misères. Ou à un autre. Finir la colère ou alors il va falloir penser dans un miroir.
Tout est prêt. Les yeux presque solides. A la vitesse de l’âge tombe le vivant assez vite. Éviter de conduire. Quoi ? Ah ! Voiture grotesque encore ? Donner le mot. Aujourd’hui nommé en marche. Avec légèreté, adresser une chiquenaude vers le manteau. Contre son front un baiser.
Une jolie robe encore. Mais elle, attachée au travail serait meilleure oisive. Rien à ses yeux ne saurait l’embellir. Préférer lire tant et tant et perdre l’amour. Plus cela. Plus jamais. Plus jamais en avoir honte. On croit être supérieur. On prend soin de bien l’expliquer et, lentement, ailleurs, on prend volontiers ce qui est permis. Fou de s’attaquer et de se défendre. Verticalement. Coup de téléphone. Ne pas répondre. Savourer le fantasme du sommeil et se faire porter malade durant les visites de cour. Horizontalement. L’électricité tricote au bureau. Dans l’après-midi les dossiers en chuchoteront et seulement pour le principe. Suçoter la torpeur au creux d’un fauteuil. Orienter l’action même au travers d’un cierge qui indique le chemin et l’impatience, cette salope ! Imaginer le brasier de l’enfer pour se protéger des vents polaires. Et de nouveau décrocher contre cette présence qui espère la pluie. Aller au hasard distiller l’espoir et la peur. Le téléphone sonne de nouveau, sévère, déserté, abandonné aussitôt. Atterrir. Enfouir sa vie humide entre les dents du métro.
Perdre ce pouvoir des choses agréables. Ton de commandement. Ordres énergiques. Obéir uniquement par jeu. Se prendre la tête dans l’obscurité et, longuement dire comment aimer puis, prendre fin. Adieu. Devoir vieillir. La baie vitrée du ciel illumine les meubles. Vont et viennent les ascenseurs initiés aux mystères des paliers. Tout en haut sèchent les troupes. Papier gris et colle sur la table qui ne lui servent jamais que de superstition. Lui ? Avec eux ! Dans le vacarme des machines flottent les bruits de rue, les trompes d’humains écrasés. Et, faisant le tour, apercevoir le paratonnerre de l’autre qui fume et manque d’être. Smoking. Étonnant ? Il paraît… Ah ! Mon petit rien du tout qui se relève et prend froid. Entretien de témoins au bout du fil. Faire confiance. Se garder de dire ou alors, une seule fois. Lire les dossiers de confidences, personnes et lieux, rapidement en mémoire, discrètement. Les récits de guerre comptent double. Dix heures sonnent. Les fiches sont arrivées, châtrant les libertins dans l’antichambre en papier rose. Les canailles seront livrées aux bonnes d’enfants. Malheur à la porte. Sourire à la main. Choses familières qui se font violence et atteignent la loi en colimaçon. Escalier dactylographe pour se renseigner aux meilleures sources. Consulter les intérêts dans le traitement de la culture des consommateurs. Parler encore confidentiel. Ensuite l’interminable silence des portefeuilles. Impossible de fouiller sur l’approvisionnement des armées. Jusqu’aux laboratoires sujets à de graves conclusions. Vous voyez ! Nous faisons connaissance. Un rapport énorme. Pouvons-nous demander… ? Non ! Ne connaître aucun nom. Passer d’un ton badin. Même les portefeuilles n’ont rien dit. Inutile d’insister pour avoir une avance. Tous rassemblés, les portefeuilles trompent en bavardant. Cela se présente comme prévu. Comment est-il ? Je le connais ! Non ! Pas tout à fait ! Ce n’est pas le même. De quoi ? De rien ! De la causerie des comptes s’élèvent des voix supérieures, des instants soudain. Discuter de cigarettes et de chocolat. Une pâtisserie ça change ! Conseil d’abord. De vider les notes sur le bureau.
Un cri tombe du poing sur la table. La jeunesse à l’excès fait des nœuds à la pluie, avec conviction. Miaule la porte. Détonation de souffrance. Se reprocher, regretter d’avoir ouvert les tenailles de la sagesse. Comme si elle avait été retrouvée ! Justement la remplacer dans l’espoir d’apprendre quelque chose sur elle. Il est inutile de briser le bois des portes pour savoir ou deviner. Percer sans oser dire comme un voleur déguisé. Soupçonner ce texte reçu de la solitude. Se laisser attendrir. Ou divorcer avec les U.S.A. Hypothèse au point du rien. Se plaindre de trop téléphoner dans la confusion. Désastreux travers des doutes dans les données par lesquelles s’exécutent les présences. Éconduire les hautains. Ne plus pouvoir rien trouver estimable. Un dernier appel. Une exclamation. Ha ! Salopard ! Nous sommes faits ! Joie admise à deux voix. Oser le week-end. Raccrocher l’enveloppe qui communique par erreur la personne. Attendre d’être certain, persuadé. Dérober le numéro pour se joindre. Incontestablement dimanche vaut un camarade. Leçon de nuit embusquée. Les idées viennent. Reprendre les notes. Éclaircir les branchages du sommeil. Avant l’explosion. Avant les rafales de voix que l’on savoure dans l’intime démon de la mémoire. Jésus disciple militaire de Dieu. Descartes qui ne sait rien. Socrate qui voudrait savoir et me connaître mais que l’amour exclut dans une bourrasque.
Remords de la situation. En venir à penser. Être submergé. Parce que l’on s’interdit l’absence on rumine au présent. Le délicieux devient horrible. De nouveau les reproches, les fautes et les scrupules. Penser pour s’amuser jusqu’au délire, pour courir et rouler sur le dos, libéré de tous les maux inexploités. Aller et venir fouetté de soupirs. Précis, moduler l’inlassable souffrance, la chaleur des habitudes. L’air vibre, traversé par les statues de sel. Celles des autres qui meurent de peur. Mais de quoi mourir d’autre ? Les terres inconnues dans les regards rencontrent la distance prouvée possible. S’évader. Se retrouver. Se soutenir. Étreint par sa propre voix. Frictionné par un cri d’invasion. Un double se reforme en chandail et pantalon rouge. Le doute maintenant revient. Il loge de sang-froid dans l’escalier, dans le placard. Difficile à formuler. Les clés de la mémoire retrouvée, frotter l’incantation. A quoi bon l’appeler. Nue. Gardienne de sympathie pour des visages jamais cherchés. Liée d’amitié à l’imagination. Immeuble de caractères et de sentiments. Devant quelle porte interdite embrasser ce trésor ? Un tour de clé avec précaution puis entrer en soi. Procéder d’abord à l’inspection de la faim et situer son bruit de rut. Dévorer momentanément le pus de la béatitude. Avec une gueule béante de pie hostile. Dévorer jusqu’à la dernière miette de sa rivale : la perplexité. Babines pantoises sous le lit. Dans l’attente. Prêtes à bondir. Veillant à l’outrage. Présence. Monstre lascif des astreintes qui glapit, qui roucoule ses élucubrations. Songe scellé dans les plaintes. Sous le lit. Dans la pénombre.
Parler alors d’elle. En exprimer l’étrange nuance qui écœure. Éclairer ce qui échappe. Présence désignée. Souffrir. Cette carence à la définir venant par l’absence de langage approprié. Agitée par les rêves, elle chante la nuit comme Mata-Hari dans les fossés de Vincennes. Présence pour annoncer son absence, la crier, la hurler. A la lueur d’une lanterne, être témoin hébété, qui s’en va, bègue. Rassurée tout à fait aujourd’hui, cette présence se peuplera plus tard d’autres inquiétudes. La coutume, qui sait, de prononcer des paroles inaccessibles. Esclaffant les preuves de la pauvreté, celle des nuits qui dorment dans la pierre. Ou dessous. Tout dépend. Raillant les monuments à la gloire de la lune. Proférant : “ Gide est un gros colon ! ”. Trépassant à détailler l’inintelligible. Cette présence n’essaye même plus de dîner. Elle se couche, vigilante aux querelles dans la télévision, n’ayant pas fermé le mur du son. Les comédiens ne peuvent pas entrer, pense-t-elle. Elle reconnaît depuis longtemps derrière ces bavardages, dans les secrets de faits divers, la dissimulation de la propagande qui veut lui faire enfiler le masque de la haine et de la peur. Même la liesse des grands jours laisse émerger la fin d’une trêve. Fuir. Par air. Par eau. Nager loin de ce carnage. Se porter sauf. Il faut se lever. User son énergie à donner le sentiment d’exister.
Les journaux se chargent de sordide. Et personne cette fois ne remarque les lézardes blanches de l’absence. Vite, s’allonger dans la rigueur de ses fautes. Commettre un midi à boire plus que d’habitude. L’autre, celui dont on ne sait pas davantage, averti des malheurs, se réjouit d’être renseigné. On reçoit en suspens un gnon noueux qui sort du passé, comme revenu d’un grand voyage pour vous démolir. S’oublier soi-même. Oublier ce tête-à-tête répugnant. S’en savoir gré. S’en prier. N’en faire rien. Et puis, ayant repoussé cette visite aux calendes grecques comme les militaires le font dans leurs communiqués, désormais, la machine s’abandonne.
A certains signes, on voit l’autre vieillir, fatigué dès le matin, la mine mauvaise. Mine de rien. Les vacances n’y font rien. La pluie télégraphie de l’aube au crépuscule. Où ça ? Nulle part ! S’éloigner pour perdre les habitudes. Pourtant, consciencieusement, on s’ennuie à mort. Parce que c’est fini. Parce que plus rien ne marche sinon ce corps à roulettes qui aurait été là. Aucun besoin de lui. Qu’il fût créé et dirigé ou même imaginé, aujourd’hui, pas besoin de lui. Trouver autre chose. Trop vieux pour travailler. Trop rouillé. Avec cette manie d’avoir l’air stupide par-dessus le marché ! Depuis quelque temps, sous clef, la maladie s’obstine à vous effrayer. La maladie enterre tout le monde. En somme, pourquoi en venir au culte de la vie. Ce n’est guère une réussite. Sinon quelques impressions et quelques détails. Rêves d’algues marines, de formes en soie au bal des bactéries. Rebelle, cet amour bleu et solitaire. Il est capable d’enfermer quelques minéraux en compagnie de la lumière, puis, très très longtemps après, de multiplier l’oxygène en une sphère terrestre. D’assimiler le soleil qui demeurait imperméable. De tuer Rodin la semaine prochaine. Son iris s’attardant à l’émotion exacte de la lumière, cet amour peut jouir de son succès, de sa jeunesse et d’écouter Debussy. Qu’importe si l’électricité ment les jours de défaillance !
Existence insipide à la gloire des touristes. Machinerie pervertie, désolante. Seul de soi, sans secours pour traverser d’un pas le réel ni planche pour franchir les gouffres. Le souvenir des jours épouvante. La saison des tourments passe à rebours et ne lâche pas la soustraction sur ses chemins de poussière. Souffrir un vent de cendre qui se dépose sur les épaules. Soulever les paupières devant quelle désolation ? Se résoudre à mourir : hypothétique condition pour ne pas rester vulgaire. Être né pour ruser avec les illusions souterraines, molles, la bouche emplie de charogne. A bout de force. Dormir noyé dans l’océan des sanglots, forcé à boire. Peut-être rester calme. S’asseoir doucement et regarder l’herbe. Pourtant la force des semaines des jours sans retour… Pourtant les mots ont l’air morts… Chercher au fond du fond le courage de piétiner les souvenirs. De renverser son corps au bord de la Seine. Lâcher la bride aux tourbillons de poussière qui chaque jour jaillissent de la vie. Va-t-en ! Va-t-en ! Une telle abondance de vide qui éclate. Le mur est cette raison-là des mots que l’on a tu. Va retrouver ce toujours inachevé ! Change de vêtements comme pour écorcher ta chair ! Puisque tu étais absent j’ai cru bon de prendre ta place ! Chasse l’esprit tout entier ! Les mots automates rebondissent contre les cloisons. Écouter muet la monstrueuse déclaration du secret qui expliquerait tout. Danger d’anges qu’on finira par apprendre. Le grand jeu. Vraiment ? Faire mieux que se taire car le temps presse. Les tambours s’animent. Bas les pattes ! Chenapan anonyme ! D’énormes galets roulent d’un mouvement contraire aux larmes. Les fenêtres s’ouvrent à ces instants qui reposent sur le marbre. Les valises ne trompent personne. Que dire à cette vérité disparue, mise à la porte ? Qu’elle est aimée ? Que quelqu’un veut l’épouser ? Derrière les pas de tristesse, ce sentiment de honte d’avoir détester la lumière. En ce pays irréel, où rien n’a jamais vraiment existé, la nuit est mûre et sent la fraîcheur sournoise. Là-bas, la solitude mortelle arrose des plantes volubiles. Oui ! Là-bas y poussent les soupirs ! Les gestes au clou ! Et de soulagements en remords, l’enveloppe du grand vide se durcit. Ce qui n’était qu’un voile, rejeté au fond de soi, derrière l’arrogance des certitudes, s’est transformé en carcasse qui étouffe. Endroit pareil à la défaite. N’être pas. Tant mieux ! Oui ! Cela suffit ! Voix fatiguée qui jure. Regret de la vie où il fallait se débattre. Attitude souveraine d’une présence plus pénible que prometteuse. Inattendue creuse. Néantérieure. Bien qu’enfermée, qu’on peine à toucher, à atteindre. Devinant quelque chose d’horrible. Présence emprisonnée, tout entière dans une souffrance monotone. Présence à laisser mourir. Anonyme. Machine sans yeux qui, à la fois, dirait l’avenir imminent et n’en verrait rien. Sentant l’informe qui allait naître et qui ne peut le dire. Devinant la route et disparaissant dans un tournant obscur, par surprise.
Question de vie ou de mort ? Quelle ineptie ! Impossible contrôle ! Rien, aucune force ne pourra les arracher l’une de l’autre. Coulent les fleuves et les pensées. Coulent les âmes et les pierres. Coulent les détresses. Coulent les consolations. Jusqu’à la mer l’eau douce va mourir et la mer s’évapore jusqu’au ciel. Tandis que le soleil, insaisissable et vorace, disparaîtra au jour marqué, comme un charbon. Quelque part.
décembre 2004